Le Conseil d’Etat a apporté le 16 juin 2008 plusieurs précisions sur la légalité de l’allocation temporaire d’attente qui est versée, sous condition de ressources, aux étrangers dont le titre de séjour ou son récépissé mentionne qu'ils ont sollicité l'asile en France et qu’ils ont présenté une demande tendant à bénéficier du statut de réfugié (CE, 16 juin 2008, CIMADE, req. n° 300636. - C. trav., art. L. 5423-8) :
1) Les personnes qui ne peuvent plus se prévaloir d’une situation de persécution (Conv. Genève, art. 1er, C, 5) ou qui proviennent d'un pays d'origine sûr (C. étrangers, art. L. 741-4, 2°) sont exclus de ce dispositif, à l'exception des « cas humanitaires signalés par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides » (C. trav., art. L. 5423-9, 1°, ex. art. L. 351-9, 1°). Cette double exclusion a été jugée contraire à la directive n° 2003/9 du 27 janvier 2003 qui s'applique à tous les ressortissants de pays tiers et apatrides qui déposent une demande d'asile à la frontière ou sur le territoire d'un Etat membre. Ses articles 2 et 13 reconnaissent aux demandeurs d'asile un droit, dès le dépôt de leur demande et aussi longtemps qu'ils sont admis à se maintenir, à bénéficier de conditions matérielles d'accueil comprenant le logement, la nourriture et l'habillement ainsi qu'une allocation journalière, quelle que soit la procédure d'examen de leur demande. Or, l'article L. 742-6 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile prévoit que les personnes originaires d’un pays d’origine sûr bénéficient du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. Si ces demandeurs d'asile peuvent être hébergés dans les centres d'hébergement et de réinsertion sociale et les centres d'hébergement d'urgence, ces structures ne fournissent ni nourriture, ni habillement et ne servent aucune allocation journalière. Pour cette raison, le 1° de l'article L. 5423-9 du code du travail est incompatible avec la directive du 27 janvier 2003.
2) Le Conseil d’Etat a par ailleurs considéré que l'article R. 5423-22 du code du travail (ex. art. R. 351-9) ne pouvait pas prévoir que le droit à l'allocation temporaire d'attente n’était ouvert qu'une seule fois, excluant par la même les demandeurs d'asile qui sollicitent le réexamen de leur dossier sur la base d'éléments nouveaux (Cf. C. étrangers, art. R. 742-1). Pour le Conseil, ces derniers doivent prétendre au bénéfice de l'allocation à compter du dépôt de leur nouvelle demande dans le cas où le directeur général de l'Office décide de procéder à un nouvel examen de leur situation.
3) En faisant obstacle à ce qu'une personne dont la protection subsidiaire est renouvelée pour une durée de douze mois puisse bénéficier de l'allocation temporaire d'attente, l’article R. 5423-19 du code du travail (anc. art. R. 351-7) méconnaît l'article 28 de la directive du 29 avril 2004 qui interdit aux Etats membres de se borner, pour assurer les « prestations essentielles » aux bénéficiaires de la protection subsidiaire, à leur accorder un hébergement dans un centre d'hébergement et de réinsertion sociale. Cette restriction est d’ailleurs en contradiction avec l'article L. 5423-8 du code du travail (anc. art. L. 351-9, II) qui ne prive pas les personnes dont la protection subsidiaire est renouvelée du bénéfice de l’allocation.
4) Les étrangers qui refusent une offre de prise en charge dans un centre d'hébergement au titre de l'aide sociale ne peuvent pas bénéficier de l'allocation temporaire d'attente. L'article 16 de la directive n° 2003/9 du 27 janvier 2003 autorisant les Etats membres à limiter ou à retirer le bénéfice des conditions d'accueil lorsqu'un demandeur d'asile abandonne son lieu de résidence sans avoir informé l’autorité compétente, le bénéfice de l’allocation versée aux demandeurs d'asile peut être subordonné à la condition que ces derniers acceptent l'offre d'hébergement qui leur est formulée.
5) L'Agence nationale d'accueil des étrangers et des migrations intervient seulement pour coordonner la gestion de l'hébergement dans les centres d'accueil pour demandeurs d'asile (CASF, art. L. 348-3). En conséquence, le préfet est seul compétent pour adresser aux demandeurs d'asile les offres de prise en charge dans de tels centres (CASF, art. R. 345-8).