Code Lexis-Nexis 2014, C. étrangers, art. L. 552-1
Dans une affaire exceptionnelle pour les négligences qui l’ont traversée, le juge des référés du Conseil État a dénoncé l’interpellation d’un étranger en compagnie de deux mineurs dans les eaux territoriales de Mayotte dans une embarcation en provenance des Comores, leur placement en rétention administrative en vue de leur éloignement. Contredisant les déclarations de l’étranger interpellé, il est rapidement apparu que les parents de l'un de ces mineurs, âgé de neuf ans, résidaient régulièrement à Mayotte avec deux autres enfants dont l'un est de nationalité française.
Certes, le juge des référés rappelle que si un mineur ne peut pas faire l’objet d’une obligation de quitter le territoire (C. étrangers, art. L. 511-4), il peut être accueilli dans un centre de rétention par voie de conséquence du placement en de la personne majeure qu'il accompagne (C. étrangers, art. L. 553-1). Dans une telle hypothèse, l'éloignement forcé du mineur doit être entouré des « garanties particulières qu'appelle l'attention primordiale qui doit être accordée à l'intérêt supérieur des enfants ainsi que l’exige l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 et, plus largement, le respect effectif des droits fondamentaux de l'enfant mineur. Parce qu’il est fait obligation au responsable du centre de rétention de tenir registre mentionnant notamment l'état-civil des mineurs et les conditions de leur accueil (C. étrangers, art. L. 553-1), les services de la préfecture doivent vérifier, « dans toute la mesure du possible », l'identité d'un mineur placé en rétention, la nature exacte des liens qu'il entretient avec l’étranger majeur qu’il accompagne et les conditions de sa prise en charge dans le lieu à destination duquel il est éloigné.
Or, dans le cas présent, l'administration avait rapidement eu connaissance de l'identité exacte du jeune mineur et de son lien de filiation avec une personne résidant à Mayotte. En dépit de ces informations, l'administration a maintenu la reconduite à la frontière de cet enfant sur le fondement d'un arrêté mentionnant une identité inexacte. Elle a ensuite mis à exécution cette mesure d'éloignement en confiant la responsabilité de l'enfant à l’étranger qui l'accompagnait au moment de l'interpellation au seul vu de ses allégations et alors même qu'elle avait été informée que les deux parents résidaient régulièrement à. Elle ne s'est pas davantage préoccupée des conditions dans lesquelles l'enfant mineur serait pris en charge dans le lieu de retour. Le juge des référés dénonce l’absence de diligences nécessaires pour réunir les informations que l’administration devait, dans le cas d'un mineur, s'efforcer de collecter avant de procéder à son éloignement forcé et l’absence de prise en compte des éléments portés à sa connaissance.
Tirant les conséquences de cette illégalité manifeste à l'intérêt supérieur de l’enfant, il refuse de prescrire à l’administration une autorisation de sortie du territoire d'un autre État d'un de ses ressortissant mineur. Elle ordonne toutefois au préfet de prendre attache avec le consulat de France des Comores pour instruire la demande de regroupement familial dans un délai de quinze jours sous une astreinte exceptionnelle en droit des étrangers de 100 euros par jour de retard (CE, 9 janv. 2015, n° 386865, Mme F. D.).