Code Litec 2010, p. 1552
Pour entrer dans le champ d’application de la clause d’exclusion prévue par l’article F de l'article 1er de la convention de Genève du 28 juillet 1951, le complice d’un crime contre l’humanité ou de génocide doit avoir sciemment, par ses agissements, contribué à la préparation ou à la réalisation du crime ou en avoir facilité la commission. Prolongeant cette logique, le Conseil d’État estime que le complice de génocide doit plus particulièrement avoir « assisté à son exécution sans chercher à aucun moment, eu égard à sa situation, à le prévenir ou à s'en dissocier. » Selon cette définition, la personne qui accueille dans sa paroisse des personnes d'origine tutsie poursuivies par des miliciens puis s'enfuit, contribuant par là même à leur massacre, ne traduit pas une intention de permettre ou de faciliter la commission de ces crimes. Elle n’omet pas non plus sciemment de les prévenir ou de s'en dissocier dès lors que ses fonctions ne lui conféraient aucune autorité sur leurs auteurs et que toute résistance de sa part aurait probablement mis sa vie en danger. Par ailleurs, aucun autre élément n'établit son approbation du génocide. Pour ces raisons, l'intéressé ne s'est pas personnellement rendu coupable comme auteur ou complice d'un crime de génocide (CE, 26 janv. 2011, req. nº 312833, X). Tel n’est pas le cas non plus d’une personne qui a poursuivi son activité de vente de bière pendant trois mois dans une région contrôlée par les auteurs du génocide rwandais en 1994. Le seul fait que le gouvernement intérimaire ait encouragé la livraison de cette boisson aux milices pour soutenir l'effort de guerre n’établit pas l’élément intentionnel. Sans doute, la connaissance qu'un individu peut avoir des conséquences de ses agissements sur la réalisation d'un crime peut établir qu'il s'en est sciemment rendu complice. Toutefois, la seule position sociale et économique, ici la connaissance de l'utilisation faite de la bière vendue, ne démontre pas que l’intéressé avait une connaissance exacte des conséquences de la poursuite d’une activité sur le génocide. Pour le moins, il ne révèle pas qu'il a sciemment décidé d'y prêter son concours. Si l’Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ne sont pas tenus d'établir la culpabilité des demandeurs d’asile, ils doivent néanmoins mettre en lumière les éléments matériels et intentionnels spécifiques à la complicité de crime contre l’humanité ou de génocide (CE, 14 juin 2010, req. n° 320630, M. Kayijuka).