Dans l’affaire " Conka " (CEDH, 5 févr. 2002, req. no 51564/99, §§ 79 et s.), la Cour européenne des droits de l’homme a jugé qu'un recours n’était pas " effectif " au sens de l'article 13 de la convention s'il n'avait pas d'effet suspensif, les États jouissant ici d'une certaine marge d'appréciation pour se conformer à leurs obligations. La France a été condamnée sur ce fondement au motif que le recours contre le refus d’entrée sur le territoire opposé à un candidat à l’asile politique placé en zone d’attente n’était pas investi d’un effet suspensif (Cour EDH, 26 avr. 2007, req. n° 25389/05, Gebremedhin c/ France). Cette condamnation met en lumière la situation de droit particulièrement précaire des candidats à l’asile se présentant aux frontières et dont la demande est jugée par le ministre de l’Intérieur " manifestement infondé " au terme d’une analyse sommaire de sa situation (C. étrangers, art. L. 221-1 et R. 213-3). Le candidat à l’asile est en effet susceptible d’être éloigné après un jour franc avant que n’intervienne la décision du juge de la zone d’attente et sans que l’Office français de protection des réfugiés et apatrides puisse se prononcer sur la réalité des persécutions, l’Office étant simplement consulté pour avis (C. étrangers, art. R. 213-2). Il existe donc un risque potentiel d’éloigner une personne vers un pays où elle risque des peines et traitements inhumains ou dégradants en l’absence de recours suspensif du refus d’entrée (Cf. Conv., art. 13). Ce risque est renforcé par une certaine pratique qui consiste à opposer le plus souvent le caractère " manifestement infondé " des risques de persécution pour justifier un placement en zone d’attente et permettre un éloignement. En 2003, seules 5,43 % des personnes (218) ont ainsi été admises à séjourner, leur demande n'ayant pas été jugée " manifestement infondée ". Dans l’affaire tranchée par la Cour européenne des droits de l’homme, l’accès au territoire national du candidat à l’asile avait précisément été refusé alors que, ultérieurement, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides avait reconnu la pertinence des persécutions encourues dans le pays d’origine. Sans doute, la Cour a relevé que l’intéressé avait la possibilité de saisir le juge administratif pour contester le refus d’admission. Celui-ci est cependant dépourvu d’effet suspensif et n’est enfermé dans aucun délai ; de fait, ce contentieux est d’ailleurs fort rare. La Cour a par ailleurs constaté que la saisine du juge des référés n'avait pas d'effet suspensif de plein droit, de sorte que l'intéressé peut être éloigné avant toute décision.