Le gouvernement avait décidé d’augmenter considérablement les droits d’inscription des étudiants étrangers. Alors que les étudiants français et européens acquittent des droits d’inscription modestes (170 euros en licence, 243 euros en master et 380 euros en doctorat), ces droits ont été fixés pour les ressortissants d’un État tiers à l’Union européenne à 2 770 euros en licence et 3 770 euros en master et doctorat et pour les formations spécialisées !
Selon l’arrêté du 19 avril 2019 (JO 21 avr. 2019, texte 28), ces droits sont applicables aux étudiants qui ne sont pas ressortissants d’un État de l’Union européenne, de l’Espace économique européen ou de la Suisse, qui ne sont pas titulaires d'une carte de résident ou de même nature, qui ne sont pas fiscalement domiciliés en France ou rattachés à un foyer fiscal domicilié en France depuis au moins deux ans, qui ne sont pas bénéficiaires du statut de réfugié ou de la protection subsidiaire ou dont l’un des parents ne bénéficie de ce statut ou dont le pays n’a conclu un accord avec la France prévoyant une clause sur les droits d'inscription. Par la suite, le décret n° 2019-344 du 19 avril 2019 avait autorisé le ministre des Affaires étrangères à exonérer partiellement les étudiants étrangers en prenant « en compte la politique étrangère culturelle et scientifique de la France et la situation personnelle des usagers, y compris leur parcours de formation » (C. éduc., art. R. 719-49-1). Localement, les étudiants pouvaient également faire état de leur situation personnelle, « notamment les réfugiés et les travailleurs privés d'emploi » et des « orientations stratégiques de l'établissement », les exonérations, totales ou partielles, ne pouvant pas dépasser 10 % des étudiants inscrits.
Une question prioritaire de constitutionnalité pourrait avoir des conséquences sur cette politique (Cons. const., déc. 11 oct. 2019, n° 2019-809 QPC). Certes, le Conseil constitutionnel ne s’est pas directement prononcé sur la décision d’augmenter les droits d’inscription des étudiants étrangers. Mais il a interprété de manière inédite le treizième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 qui prévoit que « La Nation garantit l'égal accès […] de l'adulte à l'instruction […] L'organisation de l'enseignement public gratuit […] à tous les degrés est un devoir de l'État ». Il a étendu le périmètre de cette disposition à l’enseignement supérieur en estimant que « l’exigence constitutionnelle de gratuité s'applique à l'enseignement supérieur public. Sans doute, cette exigence n’interdit pas une contribution des usagers. Mais les « droits d'inscription [doivent être] modiques » et perçus en tenant compte « des capacités financières des étudiants ». Les montants définis par l’arrêté du 19 avril 2019 apparaissant fort peu « modiques », le juge administratif ne manquera pas d’être saisi à la lumière de ce nouvel élément.