Actualité du droit des étrangers, de l'asile et de la nationalité

Instruction de la demande de carte de résident

Depuis la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006, le préfet saisit pour avis le maire de la commune de résidence concernée pour apprécier l’intégration d'un ressortissant étranger qui sollicite une carte de résident subordonnée à une durée de séjour régulier ou qui demande à être rejoint par des membres de sa famille au titre du regroupement familial (C. étrangers, art. L. 314-2 et L. 421-1). Cet avis consultatif ne doit conduire à aucune mission d’investigation ou de contrôle afin de ne pas faire peser sur le maire une mission de police administrative qui incombe aux seules autorités de l’Etat et spécifiquement au préfet. Cette procédure d’avis doit être dissociée de la vérification par le maire des conditions de logement et de ressources du ressortissant étranger à l’occasion de la procédure de regroupement familial (C. étrangers, art. L. 421-2). Sans guère préciser les moyens dont le maire peut user pour se prononcer sur l’intégration d’un candidat au séjour de longue durée, le ministre chargé de l’immigration estime que « l'objectif du dispositif est de mettre à profit la connaissance par les maires de l'environnement local de leurs administrés et des réalités sociales et humaines dans leur collectivité » (QE n° 4651, JOAN 22 janv. 2008, p. 568).

Droit de séjour ouvert en faveur des signataires d’un pacte civil de solidarité

Confirmant une pratique antérieure, la circulaire du 28 septembre 2007 du ministre des Affaires étrangères permet aux agents diplomatiques et consulaires de s'opposer à l'enregistrement d’une déclaration conjointe d’un pacte civil de solidarité unissant un ressortissant français et étranger. Alors même que dans certains pays les partenaires de pacte encourent un risque pénal et que, selon l'administration, des États étrangers pourraient prendre en France des décisions à l'égard de leurs ressortissants qui seraient contraires à l'ordre public français, la circulaire fait obstacle à l'exercice des droits liés à la signature d’un pacte. En effet, pour les étrangers, le pacte constitue l'un des éléments dont l'ancienneté est prise en considération pour la reconnaissance des liens privés et familiaux avec la France. Il est donc susceptible d’ouvrir indirectement un droit de séjour (C. étrangers, art. L. 313-11, 7°). Pour cette raison, le ministre ne pouvait pas méconnaître le principe d'égalité et soumettre à un régime de transcription différent les pactes dont les deux partenaires sont français et ceux associant un ressortissant français et étranger. Tout au plus, est-il concédé qu’il appartient au ministre de prévoir que les agents diplomatiques et consulaires mettent en garde les signataires d'un pacte d’un risque, celui-ci étant davantage dû, « d'ailleurs, à la vie commune qu'à la procédure d'enregistrement elle-même » (CE réf., 18 déc. 2007, GISTI, req. n° 310837).

Droit de séjour des membres de la famille du ressortissant communautaire

Le ressortissant communautaire pourrait être dissuadé de quitter l’État membre dont il a la nationalité à fin d’exercer une activité salariée sur le territoire d’un autre État membre s’il n’a pas la certitude de pouvoir revenir dans son pays. Cet effet dissuasif se produirait notamment au regard de la simple perspective de ne pas pouvoir y poursuivre une vie commune avec ses proches parents, fut-elle commencée par l’effet du mariage ou du regroupement familial dans l’État d’accueil. Des obstacles au regroupement familial sont donc susceptibles de porter atteinte au droit de libre circulation que les ressortissants communautaires tirent du droit communautaire, un retour dans l’État d’origine ne pouvant pas être considéré comme une situation de droit purement interne. Ce droit de séjour ne saurait être remis en cause dans l’hypothèse où l’intéressé, à son retour, n’exerce pas d’activité professionnelle ; il n’est pas non plus contesté par le fait que le membre de la famille, ressortissant tiers, avant de séjourner dans l’État membre d’accueil avec ses parents, ne disposait pas d’un droit de séjour fondé sur le droit national dans l’État dont le ressortissant communautaire possède la nationalité. Il importe en effet d’assurer la protection de la vie familiale des ressortissants communautaires afin d’éliminer les obstacles à l’exercice des libertés fondamentales garanties par le traité (CJCE, grande chambre, 11 déc. 2007, aff. C‑291/05, Minister voor Vreemdelingenzaken en Integratie c/ R. N. G. Eind. – sur ce dernier point, CJCE, 11 juill. 2002, Carpenter, aff. C-60/00, Rec. CJCE p. I-6279, § 38).

Séjour des ressortissants communautaires

La circulaire n° IMID0768184C du 12 octobre 2007 du ministre chargé de l'immigration précise les conditions dans lesquelles les justificatifs relatifs aux ressources des étudiants communautaires sont demandés. Elle rappelle également la suppression de l'obligation faite aux ressortissants communautaires de justifier de leur résidence pour obtenir un titre de séjour. Abrogeant sur ce double point la circulaire du 6 décembre 2000, le texte répond à une mise en demeure de la Commission européenne qui estimait que le droit français était non conforme à la législation européenne. Pour l’avenir, il est demandé aux préfectures de n'exiger, ainsi que le suggérait la circulaire du 6 décembre 2000, aucune pièce concernant la nature des ressources et leur montant, une déclaration sur l’honneur étant seule requise (sur cette exigence, C. étrangers, art. R. 121-12). La seconde disposition litigieuse du droit français portait sur la justification du domicile du ressortissant communautaire, quel que soit le motif de son séjour. Pour satisfaire au droit communautaire, les préfectures ne devront plus subordonner la délivrance d'un titre de séjour à la justification de leur résidence en France. Désormais, les autres documents exigibles selon la catégorie à laquelle ils appartiennent permettront d'établir la réalité de leur présence en France (sur les documents exigibles des ressortissants de l'Union européenne, C. étrangers, art. R. 121-10 à R. 121-14).

Modalités de délivrance des titres de séjour

Pris en application de la loi n° 2006-586 du 23 mai 2006 et de la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006, le décret n° 2007-1292 du 30 août 2007 précise les conditions du séjour des étrangers participant à une mission de volontariat en France. Aux termes des nouveaux articles R. 311-32 à R. 311-34 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, une autorisation provisoire de séjour est délivrée à l'étranger qui souhaite effectuer une mission sociale ou humanitaire de volontariat en France auprès d'une fondation ou d'une association reconnue d'utilité publique. Cette mission doit promouvoir l'autonomie et la protection des personnes, renforcer la cohésion sociale, prévenir les exclusions ou porter sur des actions de solidarité en faveur de personnes défavorisées ou sinistrées résidant sur le territoire français. Les associations ou fondations concernées doivent justifier d'au moins trois années d'existence et être titulaire d'un agrément délivré par le préfet du département d'implantation de la structure d'accueil du volontaire (pour l’agrément des associations et fondations, D. n° 2006-1205, 29 sept. 2006). La demande d'autorisation provisoire de séjour doit être déposée dans un délai d'un mois à compter de l’entrée en France. Elle est délivrée après présentation d’un visa de long séjour. Le décret définit par ailleurs les modalités de délivrance de plusieurs titres de séjour (C. étrangers, nouvel art. R. 313-18 pour la carte de séjour "travailleur saisonnier"; art. R. 313-19 pour la carte de séjour "salarié en mission"; art. R. 313-20-2 pour la carte de séjour temporaire "compétences et talents" et "salarié en mission").

Présentation personnelle en préfecture

Par dérogation au principe selon lequel un étranger doit se présenter physiquement en préfecture pour y souscrire une demande de carte de séjour, le préfet peut prescrire un dépôt au commissariat de police ou, à défaut, à la mairie de résidence du requérant (C. étrangers, art. R. 311-11). Il peut également autoriser une transmission par voie postale. Saisi d'un recours en annulation dirigé contre une décision rejetant implicitement une demande de titre de séjour transmise par courrier, le juge administratif ne peut pas se saisir d'office de la question de savoir si la règle de la présentation personnelle a été respectée. Le moyen tiré de la méconnaissance de la règle de présentation personnelle en préfecture ne constitue en effet pas un moyen d'ordre public (CAA Paris, 3 juill. 2007, M. Noureddine X, req. n° 07PA01324).

Dépôt d’une demande de titre de séjour en consulat

Un étranger peut présenter sa demande de carte de séjour auprès de la représentation consulaire française du pays où il a établi sa résidence habituelle (Cf. C. étrangers, art. R. 311-1). Toutefois, l'autorité compétente pour délivrer cette carte ou refuser de la délivrer demeure le préfet du département où l'étranger déclare vouloir séjourner. Un consul devant se borner à transmettre la demande au préfet concerné, il ne peut pas formellement refuser de délivrer un titre de séjour (CE, 4 juill. 2007, M. Laredj A, req. n° 294391).

Refus de renouvellement du titre de séjour portant la mention " étudiant "

Un étranger ne peut se prévaloir de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales relatif au droit au respect de la vie privée et familiale pour contester un refus de renouvellement du titre de séjour portant la mention " étudiant ". Selon une jurisprudence constante, seul un moyen tiré d’une erreur manifeste dans l’appréciation de la réalité et du sérieux des études poursuivies peut être soulevé (CE réf., 8 juin 2007, Min. int. c/ M. Yu A, req. n° 298802).

Droit à se présenter devant un tribunal

Selon une jurisprudence établie, l'administration consulaire dispose d'un large pouvoir discrétionnaire pour se prononcer sur les demandes de visa de court séjour. De manière inédite, le Conseil d’Etat a estimé qu’elle est toutefois tenue de réserver une suite favorable lorsque le refus de visa met en cause l’exercice des garanties prévues par les articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatives au procès équitable et au recours effectif. Tel est le cas lorsqu'un étranger doit comparaître personnellement, à la demande de la juridiction, à l'audience au cours de laquelle un tribunal français doit se prononcer sur le fond d'un litige auquel il est partie. Ce droit de séjour trouve sa limite lorsque l’intéressé a, en vertu des textes de procédure, la faculté de se faire représenter par un conseil ou toute autre personne. L’administration conserve toutefois la faculté, ainsi que le prévoit l'article 5 de la convention d'application de l'Accord de Schengen repris par le règlement n° 562/2006 du 15 mars 2006, de délivrer discrétionnairement un visa pour des motifs humanitaires (CE, 6 juin 2007, M. Abdelkader A, req. n° 292076 : faculté de représentation devant le tribunal des affaires de la sécurité sociale ouverte par l’article R. 142-20 du code de la sécurité sociale).

Ministère de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement

Le décret n° 2007-999 du 31 mai 2007 précise les attributions du ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement, M. B. Hortefeux. De manière générale, il “ prépare et met en œuvre la politique du Gouvernement en matière, d'immigration, d’asile, d'intégration des populations immigrées, de promotion de l'identité nationale et de codéveloppement [… et] les règles relatives aux conditions d'entrée, de séjour et d’exercice d'une activité professionnelle en France des ressortissants étrangers ”. Cet accolement inédit des différents éléments du droit des étrangers se traduit par une compétence transversale sur plusieurs ministères. Le ministre devra en effet exercer ses compétences en matière de lutte contre l’immigration illégale et la fraude documentaire en liaison avec le ministre de l’Intérieur. Il devra par ailleurs collaborer avec ce dernier et avec le ministre du travail pour assumer la charge de la lutte contre le travail illégal des étrangers. Enfin, c’est conjointement avec le ministre des Affaires étrangères, qu’il assumera la politique d’attribution des visas. Les politiques de codéveloppement, de coopération et d’aide au développement “ qui concourent au contrôle des migrations ” seront également exercées en liaison avec le ministre des Affaires étrangères et de l’économie. Une dernière fonction, inédite depuis 1952 et hautement problématique puisqu’elle brouille les frontières le droit des étrangers, lui a été confiée. M. Hortefeux assumera en effet la responsabilité en matière de droit d'asile, de protection subsidiaire et de prise en charge sociale des personnes intéressées. Cette charge sera exercée “ dans le respect des attributions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Commission des recours des réfugiés ” (art. 1er).

Communauté de vie d’un couple

L'article L. 313-11, 4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile subordonne la délivrance de la carte de séjour temporaire au conjoint d’un ressortissant français à une condition de communauté de vie. Ce droit n’est pas remis en cause par une séparation de résidence justifiée par des raisons professionnelles indépendantes de leur volonté. La communauté de vie est ici établie par un faisceau d’indices concordants : billets de trains et d'avion se rapportant à des voyages entre les communes des époux ; attestation d’occupation conjointe d’un appartement ; relevés d’un compte bancaire commun ; certificats de scolarité des enfants (CE réf., 28 mars 2007, M. Eric Aimé A, req. n° 295432).

Séjour des conjoints de ressortissants français

La circulaire n° INT/D/07/00031/C du 19 mars 2007 précise les conditions de délivrance d’un visa de long séjour au conjoint étranger de ressortissant français (C. étrangers, art. L. 211-2-1). Depuis la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006, l’article L. 311-7 du code de l’entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d’asile impose à compter du 26 août 2006 la production d’un visa pour obtenir une première carte de séjour. Les intéressés ne peuvent donc se borner à justifier d’une simple entrée régulière sur le territoire. En dehors d’un changement de statut ou d’un droit au séjour fondé sur une autre cause, ils doivent, s’ils ne produisent pas un visa de long séjour, être invités à regagner leur pays d’origine afin de satisfaire à cette formalité. L’autorité préfectorale est toutefois invité à observer une période transitoire au bénéfice des titulaires de visas délivrés sous l’empire de l’ancienne réglementation. Surtout, les conjoints mariés en France, entrés régulièrement sur le territoire sous couvert d’un visa de court séjour et justifiant de six mois de vie commune bénéficient d’un dispositif dérogatoire les dispensant de retourner dans leur pays d’origine. Ils peuvent en effet se présenter en préfecture pour solliciter un visa de long séjour qui régularisera a posteriori leur entrée en France.

Rapport sur l'immigration

Prévu par l'article L. 111-10 du code des étrangers, le troisième rapport sur l'immigration a été rendu public. Il contient des informations statistiques sur les conditions de délivrance des titres de séjour et, plus largement, sur toutes les décisions relatives à l'entrée, au séjour et au départ des étrangers. Il est consultable à l'adresse suivante:http://www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/074000232/index.shtml

Modalités de délivrance des titres de séjour

Un très volumineux décret, parfaitement illisible puisqu’il codifie de nombreux articles de la partie réglementaire du code de l’entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d’asile, définit les modalités de délivrance des titres de séjour (D. n° 2007-373, 21 mars 2007). Il parachève pour l’essentiel le cadre d’application de la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration. Le décret porte sur les conditions de retrait d’un titre de séjour (art. R. 311-14 et R. 311-15), la délivrance de l'autorisation provisoire de séjour (art. R. 311-3), de la carte de séjour " étudiant " (art. R. 311-32), du titre de séjour portant la mention " scientifique " (art. R. 313-11) et de la carte de séjour délivrée au ressortissant de pays tiers titulaire du statut de résident de longue durée dans un autre Etat de l'Union européenne (art. R. 313-34-1), le fonctionnement de la commission chargée de déterminer les critères d'évaluation du projet déposé par le candidat à la carte de séjour " compétences et talents " (art. R. 315-1 à R. 315-11) et l’éloignement forcé des ressortissants communautaires (art. R. 531-3-1).

Séjour des ressortissants communautaires

Abrogeant, le décret n° 94-211 du 11 mars 1994, le décret n° 2007-371 du 21 mars 2007 précise le cadre d’application du droit de séjour des citoyens de l'Union européenne, des ressortissants des autres Etats parties à l'Espace économique européen et de la Suisse ainsi que des membres de leur famille (C. étrangers, art. R. 121-1 à R. 122-5). Le décret met en œuvre les articles L. 121-1 à L. 122-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d’asile. Il garantit un droit d’accès aux intéressés munis d'une carte d'identité ou d'un passeport et, pour les membres de sa famille ressortissants d'un Etat tiers, des facilités pour obtenir un visa. Le droit de séjour s’organise en trois temps : séjour de moins de trois mois (C. étrangers, art. R. 121-3), d'une durée supérieure à trois mois (C. étrangers, art. R. 121-4 et R. 121-5), d’une durée supérieure à cinq ans (C. étrangers, art. R. 122-1). Le décret détermine également les modalités de reconduite à la frontière et d’expulsion des ressortissants communautaires (C. étrangers, art. R. 512-1-1 et R. 522-9. – sur ce point voir égal. art. R. 531-3-1 introduit par D. n° 2007-373, 21 mars 2007).