Code Lexis-Nexis édition 2022, C. étrangers, Livres 3 et 6 et Droit des étrangers, partie 2, § 617 (Lexis-Nexis)
Déduite de l'article 12 de la Déclaration de 1789 (« La garantie des droits de l'Homme et du Citoyen nécessite une force publique : cette force est donc instituée pour l'avantage de tous, et non pour l'utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée »), l’interdiction de déléguer à des personnes privées des compétences de police administrative générale constitue un « principe inhérent à l'identité constitutionnelle de la France » qui impose de garantir son effet plein et inconditionnel sans qu'y fasse obstacle l'application d'une directive européenne. Sur ce fondement déjà mobilisé par le Conseil d'État quelques mois plus tôt (CE ass., 21 avr. 2021, n° 393099, La Quadrature du Net et autres), le Conseil constitutionnel a contrôlé la constitutionnalité du dispositif qui impose aux entreprises de transport international de rapatrier des étrangers qui n’ont pas été admis en France, alors même que ce dispositif résulte d’une directive européenne.
Sur le fond, il a été pris acte que la décision de mettre en œuvre le réacheminement des personnes concernées relevait de la compétence exclusive des autorités françaises aux frontières. Les entreprises de transport aérien ne sont en effet tenues que de prendre en charge ces personnes et d'assurer leur transport à la requête de ces autorités. La loi ne met donc pas à leur charge une obligation de surveiller les étrangers concernés ou d'exercer une contrainte sur eux. De telles mesures relèvent des seules compétences des autorités de police qui s'exercent dans le cadre d'une mission qualifiée par le Conseil constitutionnel de « police administrative générale », alors même qu'elle relève d'une loi de police spéciale précisément décrite par le Code des étrangers. La loi n’interdit par ailleurs pas au commandant de bord de sa faculté de débarquer une personne présentant un danger pour la sécurité, la santé, la salubrité ou le bon ordre de l'aéronef. Cette faculté est prévue par l'article L. 6522-3 du Code des transports, de sorte que l'exécution d'un rapatriement ne met pas en cause la sécurité du vol (Cons. const., 15 oct. 2021, n° 2021-940 QPC, Société Air France. - Pour la constitutionnalité des sanctions administratives infligées aux transporteurs, Cons. const., 25 oct. 2019, n° 2019-810 QPC, Société Air France et CESEDA, art. L. 826-1).