CIRCULAIRE N° NOR/INT/K/06/00058/C, MINISTRE D’ETAT, MINISTRE DE L’INTÉRIEUR ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE, 13 Juin 2006
OBJET : Mesures à prendre à l'endroit des ressortissants étrangers dont le séjour en France
est irrégulier et dont au moins un enfant est scolarisé depuis septembre 2005.
REF : Circulaire n° NOR/INT/05/00097/C du 31 octobre 2005.
RESUME : Cette circulaire a pour objet de présenter les mesures ponctuelles à prendre à l’égard des ressortissants étrangers en situation irrégulière dont un enfant au moins est scolarisé, dont il vous avait été demandé de suspendre l'éloignement jusqu'à la fin de l'année scolaire 2005/2006.
Le Gouvernement entend promouvoir une politique d’immigration équilibrée, prenant mieux en compte les besoins de la France et ceux des pays d’origine : les instruments de cette politique sont consacrés par le projet de loi relatif à l’immigration et à l’intégration, actuellement débattu devant le Parlement. Cette politique a notamment pour objet d’assurer les conditions de l’intégration des étrangers admis à séjourner en France. Le contrat d’accueil et d’intégration est généralisé. La procédure du regroupement familial est réformée. La volonté de lier l’immigration aux capacités d’accueil de notre pays doit s’accompagner d’une politique incitative d’aide au retour en faveur des étrangers en situation irrégulière, en particulier en direction des personnes susceptibles de participer au développement de leur pays d’origine.
Par ma circulaire du 31 octobre 2005 citée en référence, j’ai notamment appelé votre attention sur la situation de certaines familles dont les membres, présents depuis plusieurs années sur le territoire national, ont manifesté une réelle volonté d’intégration, et qu’il peut être justifié, au regard de leur situation particulière, d’admettre au séjour à titre exceptionnel et humanitaire. Je vous ai également demandé de ne pas mettre à exécution avant la fin de l’année scolaire les mesures d’éloignement prononcées à l’encontre des familles dont un enfant est scolarisé depuis plusieurs mois. Il m’apparaît aujourd’hui nécessaire, à la veille de la fin de l’année scolaire, de compléter ces instructions.
I – CHAMP D'APPLICATION
La présente circulaire n'est pas applicable aux étrangers qui se trouvent dans l'hypothèse visée au 1° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui s'applique aux personnes dont la demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat en application du règlement du Conseil du 18 février 2003.
II – AIDE AU RETOUR VOLONTAIRE
Je vous demande d’informer les familles d’étrangers en situation irrégulière comportant au moins un enfant mineur scolarisé, y compris les familles monoparentales, des modalités possibles de retour volontaire. Il est absolument nécessaire que, de manière personnalisée, chacune de ces familles dispose de toute l’information utile pour être en mesure de choisir de retourner volontairement dans son pays d’origine lorsque l’année scolaire sera achevée.
J’attends de votre part une mobilisation personnelle immédiate dans cette démarche. Il s’agit de proposer effectivement à ces familles l’aide au retour afin de les inciter à rentrer volontairement ensemble dans leur pays d’origine. Je vous demande de vous rapprocher de la délégation de l’Agence nationale de l’accueil des étrangers et des migrations compétente afin de mettre effectivement en œuvre, dans les meilleurs délais, cette procédure d’information individualisée.
Je vous rappelle que l’aide financière proposée aux étrangers qui acceptent de retourner volontairement dans leur pays d’origine a été portée, par les circulaires du 19 septembre 2005 et du 30 mars 2006, de 150 € par personne à 2.000 € pour un adulte seul, 3.500 € pour un couple, auxquels s’ajoutent 1.000 € par enfant mineur jusqu’au troisième, puis 500 € par enfant supplémentaire.
Ce montant pourra être doublé, pour les familles qui auront demandé à bénéficier de l'aide au retour volontaire dans un délai de deux mois suivant la publication de la présente circulaire, dans les conditions prévues par une circulaire conjointe du ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire et du ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Si ce dispositif particulièrement incitatif ne permet pas de convaincre certaines familles de rentrer volontairement dans leur pays d’origine, il vous appartiendra alors de réexaminer leur situation au regard du séjour, dans le cadre de votre pouvoir d'appréciation, dès lors qu’elles en feront la demande dans le même délai de deux mois à compter de la publication de la présente circulaire.
III – RÉEXAMEN DE LA SITUATION EN VUE D'UNE ADMISSION AU SEJOUR À TITRE EXCEPTIONNEL ET HUMANITAIRE
Ce réexamen pourra vous conduire à admettre au séjour certaines de ces familles, de manière exceptionnelle et humanitaire, dans l’intérêt des enfants, afin de leur permettre de sortir d’une situation de précarité et de pouvoir bénéficier des conditions d’une intégration satisfaisante en France.
Dans le cadre de votre pouvoir d'appréciation, vous pourrez utilement prendre en compte les critères suivants :
- résidence habituelle en France depuis au moins deux ans à la date de la publication de la présente circulaire d’au moins l'un des parents;
- scolarisation effective d’un de leurs enfants au moins, en France, y compris en classe maternelle, au moins depuis septembre 2005 ;
- naissance en France d’un enfant ou résidence habituelle en France d’un enfant depuis qu’il a atteint au plus l’âge de 13 ans ;
- absence de lien de cet enfant avec le pays dont il a la nationalité ;
- contribution effective du ou des parents à l’entretien et à l’éducation de l’enfant dans les conditions prévues par l’article 371-2 du code civil depuis sa naissance ;
- réelle volonté d’intégration de ces familles, caractérisée notamment par, outre la scolarisation des enfants, leur maîtrise du français, le suivi éducatif des enfants, le sérieux de leurs études et l’absence de trouble à l’ordre public.
J’insiste sur le caractère ponctuel de ces dispositions d'admission exceptionnelle au séjour, qui n’ont vocation à bénéficier qu’aux familles qui auront refusé l’aide au retour exceptionnelle, auront déposé leur demande dans les deux mois qui suivent la publication de cette circulaire et dont vous estimez qu’elles remplissent, à cette date, ces critères.
Vous veillerez à statuer sur chaque demande d'admission exceptionnelle au séjour dans un délai d'un mois suivant la réception de cette demande et, en tout état de cause, avant la rentrée scolaire de septembre 2006.
Dans l’hypothèse où vous auriez décidé de répondre positivement à ces demandes, vous délivrerez aux intéressés une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ".
Vous voudrez bien me rendre compte régulièrement (sous le timbre de la direction des libertés publiques et des affaires juridiques/centre national d'animation et de ressources) de l'application de la présente circulaire, en précisant le nombre de familles et de personnes qui auront regagné volontairement leur pays d’origine à la faveur de l’aide au retour exceptionnelle attribuée ainsi que le nombre de familles et de personnes qui auront été admis au séjour en application de cette circulaire.
Je vous serais reconnaissant de me faire parvenir vos compte rendu pour les 15 juillet, 15 août et 1er septembre prochains. Je vous demande de veiller tout particulièrement à la mise en œuvre des présentes instructions qui mettent fin à celles relatives à la suspension de l’éloignement des familles dont un enfant est scolarisé depuis plusieurs mois, contenues dans la circulaire du 31 octobre 2005 susvisée.
Pour l’avenir, il vous appartiendra de statuer sur les demandes qui vous seraient présentées par des familles placées dans des situations comparables, dans le cadre du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, tel qu'il aura été modifié par la loi relative à l'immigration et à l'intégration qui aura été promulguée à cette date, et de votre pouvoir d’appréciation consacré par
la jurisprudence. Mes services se tiennent à votre disposition pour vous apporter tout élément d’information complémentaire dont vous auriez besoin. J’attends que vous vous impliquiez personnellement dans le traitement et le suivi de ces situations particulièrement sensibles.